A l’affiche, pour cette rentrée culturelle, du théâtre d’expression Kabyle avec « Akkin i tsusmi ». Cette pièce théâtrale est à découvrir pour la première fois le 11 octobre prochain au Café de Paris, dans la capitale française. Une oeuvre inédite mise en scène par le prolifique Hace Mess. Voici quelques mots sur la pièce et sur son auteur.
Mot sur « Akkin i tsusmi » :
Un couple kabyle attend depuis un moment l’arrivée de leurs bons amis qui devaient venir pour le dîner, mais ils n’arriveront jamais… Inquiétant. S’agit-il d’un malheur, d’une séparation, d’un cambriolage ? A chercher les raisons de cette absence, l’homme et la femme se disputent au sujet du couple de leurs amis. Naturellement, la femme prend la défense de son amie Nadia et l’homme de son collègue Kamel. A confronter leurs visions radicalement opposées, ils enchaînent les quiproquos absurdes et les révélations intimes, remettant en cause, sans s’en rendre compte, les fondements de leur propre couple.
Le manque de comédien(ne)s [fiables] a conduit Hace Mess à écrire une pièce avec un seul personnage, voire deux. L’idée, c’était celle de deux personnages qui se disent la vérité, toute la vérité, au-delà des complexe du corps et les barrières dressées par la société et l’inconscient collectif; jusqu’à l’impudeur. Avant tout, il voulait sortir de la tradition qui nous invite à assister à des textes qui dessinent une Kabylie que l’on évoque par nostalgie, une Kabylie qui n’existe que dans les fantasmes et l’imaginaire collectif ; à travers ce texte, il voulait être témoin de son temps, de ce que sa génération pourrait traverser et vivre. Il voulait que l’on mette l’individu au centre de la discussion, de l’image, de l’analyse, parler de l’être qui traverse toutes ces crises : sociales, économiques, identitaires, affectives…
Par gêne, par intérêt ou fatalisme, on se dit rarement la vérité dans la vie. Hace Mess a cherché un hiatus qui bouleverse la vie de ce couple et le faire parler… Quand on ne pense qu’au rôti (la femme), resté accroché au téléphone (l’homme) c’est la fin du monde si les invités ne viennent pas dîner ! Ce mari et cette femme n’ont plus rien à se dire. Ce sont les autres qui remplissent leur vie. Ils attendent. Dans le silence. Dans le vide. Comme deux lignes parallèles, comme disait V. Gheorghiu, qui ne peuvent se rencontrer que dans l’infini. De quoi se parler quand on n’est pas dans la représentation qu’on devrait donner aux amis ? Comment affronter cette familiarité en dehors des « étrangers » qui habillent leurs quotidiens ? Ce couple n’a plus rien à penser en dehors des autres !
Ces deux personnages pensent vivre une certaine idée du bonheur, mais ils se rendent compte – dès le début de la pièce – que leur relation est basée sur le mensonge et que même dans leur intimité, ils n’arrivent pas à être eux-mêmes. Ils vivent à la troisième personne. Leur couple est un carcan dont ils ont du mal à se libérer : ils se mentent en jouant la comédie du couple qui va bien. Ils parlent tout le temps pour ne pas aborder l’essentiel.
Mais le sens, le fond de « Akkin i tsusmi », c’est aux spectateurs, à nous d’en parler. Le sens est plus violent qu’il n’y apparaît, puisque la pièce se présente comme un divertissement. Divertissement n’est pas sens de futilité. Mais il n’en est pas moins vrai que cette pièce a une acuité et une virulence qui ne sont pas courante dans les textes présentés par la scène théâtrale kabyle.
Mot sur l’auteur
Après avoir passé la grande partie de sa vie en terre natale, la Kabylie, il part en France en 2003 pour poursuivre ses études en électrotechnique. En 2008, il part au Canada pour une aventure jusqu’à 2015. Poète, auteur de théâtre, comédien et metteur en scène, il écrit dans les deux langues: sa langue maternelle, le kabyle, et le français. Il a adapté en kabyle plusieurs œuvres (nouvelles, poèmes, pièces de théâtre) d’auteurs étrangers : Félix Leclerc, Rose Reginald, Charlie Chaplin, Émile Zola, Garcia Marquez, Khalil Gibran, Jack London, Léo Ferré, Ésope, Confucius, Bertolt Brecht, Luxun, Ibsen, Jodorowsky, Oscar Wild, Jacques Brel, Graeme Allwright, Mahmoud Darwich, etc.
• Les rides du temps (poésie);
• La douceur de l’amertume (théâtre).