Romain yerra-d : acimi tutlayt taqbaylit simmal ur d-tjebbed ara aṭas n lɣaci ?
Si la langue kabyle séduit de moins en moins de monde, c’est parce qu’elle n’a pas beaucoup de choses à raconter ni sur le plan scientifique, ni sur le plan philosophique, ni sur le plan spirituel, ni sur le plan artistique…
Un semblant de renaissance durant les années 70
Il y a eu un semblant de renaissance durant les années 70, grâce à la génération « Vava Inouva », des universitaires pour la plupart, qui ont réussi pendant un moment à faire aimer la langue kabyle en traitant, par les voies du théâtre, de la chanson et des rencontres culturelles, de nouveaux thèmes, et ce grâce à l’adaptation et à la traduction des grandes idées universels (philosophiques, politiques, littéraires et artistiques), traitées à l’origine par de grands poètes, écrivains, chansonniers et dramaturges d’ailleurs.
Cette tentative a été très bénéfique à la langue kabyle. Les nouvelles thématiques lui ont permis de respirer et de s’exprimer autrement que d’habitude. Sans oublier que les acteurs culturels ne connaissaient pas uniquement la langue kabyle, mais la culture kabyle. Ce qui leur permettait d’aller et venir entre le monde kabyle et le reste du monde. Rien que sur le plan musical, les nouvelles thématiques ont ouvert la porte aux harmonies et aux nouveaux styles musicaux comme la folk et le rock.
Elle ne transmet ni les légendes d’antan ni les idées nouvelles
Cette période de conquête culturelle n’a pas duré. Les conservateurs ont vite récupéré le terrain en remettant dans le circuit et sur le marché de la poésie, le folklore et les idées locales. De son côté, le pouvoir a fourni les médias pour les promouvoir. La boucle est bouclée. La langue kabyle ne transmet plus rien; ni les légendes d’antan, ni les idées nouvelles venues d’ailleurs.
La poésie kabyle n’attire plus les citadins, car elle traite des mêmes thèmes que la langue arabe et en moins bien. Seuls ceux qui aiment les arabesques poétiques et les sourates rimées continuent de se délecter localement d’une poésie moralisatrice et moralisante rimant frustration avec le désespoir.
La langue doit porter du bon et du neuf pour intéresser le monde. Elle doit avoir des choses à raconter, une mythologie, une religion, une pensée, un univers. La langue kabyle a oublié ses propres mythes, son passé, sa vision du monde, son espace géographique… Elle imite la langue arabe et ses thématiques. Les auditeurs, même Kabyles, préfèrent écouter la culture arabe et islamique en langue arabe.
Elle doit reconquérir son vrai univers
La langue kabyle ne sera pas sauvée par l’école actuelle, ni par la production culturelle, ni par le nnif, mais par les idées.
La langue ressemble à l’eau, si elle ne coule pas, elle finit toujours par devenir verte et lourde. La langue d’Anzar doit couler, comme l’eau, pour s’éclaircir et redonner vie à nos champs, nos montagnes, nos rivières, nos plaines et nos enfants.
Elle doit reconquérir son vrai univers méditerranéen, ce qui lui ressemble, pour s’affirmer, pour affirmer sa personnalité et sa spécificité. Elle ne peut séduire en racontant l’univers algérien arabo-islamique, pas même les Kabyles.
Aucune langue ne peut raconter et chanter Anzar comme la langue kabyle !
Aucune langue ne peut raconter et chanter Allah comme la langue arabe !
A nous de choisir !