Il a 60 ans aujourd’hui : retour sur le parcours militant de Mass Mouloud Mebarki

Ass-a 60 iseggasen ɣer-s : tuɣalin ɣef umecwaṛ n umeɣnas mass Mulud Mbaṛki

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Né le 09 Mai 1960 à Melbou, Mouloud Mebarki fête ses 60 ans aujourd’hui. Ce cadre historique du MAK a connu l’évolution du combat de la Kabylie depuis les années 70. Dans un entretien qu’il nous a accordé, au micro de Hakym, il est revenu sur son long parcours de militant pour la cause Kabyle.

Déclic à l’adolescence

Dès son enfance, Mouloud Merbarki se posait des questions sur ce qu’on lui apprenait à l’école. Ce qui faisait de lui un enfant révolté. Mais c’est à 14 ans qu’il s’est interrogé : « Pourquoi j’apprends le français et l’arabe à l’école mais pas ma langue?« . Une question qu’il a soulevé auprès de sa mère qui n’avait pas su répondre.

Ce n’est que quelques années plus tard qu’il a eu la réponse à sa question : « Un jour, en rentrant au village, j’ai entendu une musique aux sonorités nouvelles qui m’a attiré ainsi que le mot « tamazight » et « imazighen ». J’ai demandé ce que c’est Imazighen, on m’a dit « d nekkni, c’est nous ! ». J’ai demandé qui chantait et on m’a dit « Ferhat Imazighen Imula ». » nous a t-il confié en poursuivant : « c’est un épisode vraiment important, j’ai enfin eu la réponse à la question que j’ai posé à ma mère quand j’avais 14 ans, c’était le déclic. »

Le combat pour Tamazight

C’est donc à partir de là que Mouloud Mebarki a commencé, chaque jour un peu plus, à épouser la cause identitaire : « je me suis révolté comme beaucoup de jeunes lors des événements de 80. J’ai mené des actions, de propagande notamment, dans le cadre du MCB, puis j’ai intégré le RCD » a-t-il dit au micro de Hakym tout en précisant : « Dans ce parcours, tout ce qui m’importait, c’était la langue amazighe et son officialisation. »

En 1993, Mouloud Mebarki, entrepreneur, s’installe dans l’Ouest algérien, à Sidi bel Abbès. En 1995, il y crée un bureau local du RCD. Une période durant laquelle il a organisé plusieurs actions en faveur de Tamazight un peu partout dans le Ouest algérien.

Printemps noir de 2001, la rupture

En 2001, Mouloud Mebarki est rentré en Kabylie pour prendre part à la traditionnelle marche de commémoration du Printemps berbère, mais le soulèvement qui a suivi l’assassinat de Guermah Massinissa en a décidé autrement : « J’ai abandonné l’entreprise et je me suis totalement consacré à la cause. Je me suis dit « ce n’est plus possible de continuer comme cela » ».

Mouloud Mebarki a été alors représentant de la localité de Melbou au sein des ârchs, principalement, pour travailler à faire arrêter l’effusion du sang. Lors de l’appel de Ferhat Mehenni pour une autonomie de la Kabylie, quelques semaines seulement après le début des événements du Printemps noir, le délégué des ârchs a essayé de sensibiliser des cadres du mouvement citoyen à l’idée de l’autonomie, en vain : « moi j’avais jeté la casquette RCD mais pas d’autres. Ils n’étaient pas ouverts à de nouvelles idées et ont gardé les positions de leurs partis respectifs bien qu’ils soient engagés dans le mouvement des ârchs ».

Rencontre avec Ferhat Mehenni

Bien que les deux hommes se soient croisés dans des activités militantes passées, ce n’est que quelques mois avant le 1er congrès constitutif du MAK, en 2007, qu’une rencontre a eu lieu entre eux. Mouloud Mebarki avait alors fait part à Ferhat Mehenni de son avis : »pour moi nous sommes toujours colonisés« . « Oui nous sommes colonisés par l’arabo-islamisme« , a rétorqué le futur Président de l’Anavad. « c’est là que j’ai compris qu’on était en phase » nous a-t-il confié.

Au sujet de ce Congrès constitutif du MAK, qui a eu lieu le 14 Aout à Ighil Ali, Mouloud Mebarki a témoigné d’un large échange démocratique, aussi bien sur la cause, la stratégie ainsi que les statuts du nouveau mouvement. C’est à partir de là, que le choix de Ferhat Mehenni en tant que leader du mouvement, a été acté à l’unanimité, a-t-il ajouté.

Arrestations et intimidations à répétition

Mouloud Mebarki, une icône du mouvement indépendantiste Kabyle, a occupé divers postes au sein du MAK. Secrétaire général, puis Président par Interim ou encore Président du Conseil national, Mouloud Mebarki reste néanmoins humble dans tout ce qu’il a accompli pour la cause Kabyle. Pourtant, il a su être décisif dans des moments difficiles qu’a traversé le mouvement.

Mouloud Mebarki a également subi maintes répressions de la part du pouvoir algérien. Bien qu’il n’en a pas parlé dans notre entretien, il a consenti de multiples sacrifices et fait face aux répressions policières et judiciaires algériennes tout au long de son parcours : arrestations, fermeture et saccage de commerces à plusieurs reprises, intimidations de tout genre. Des sacrifices, finalement, consentis en famille.

Mouloud Mebarki et son épouse

La Kabylie reconnaissante

Le 1er Mai dernier, un incendie a ravagé la maison de la famille Mebarki. Fort heureusement, sa famille s’en sortie sans dégâts humains, mis à part une blessure à la main que le militant a eu.

Une nouvelle épreuve à affronter pour le militant et sa famille mais la mobilisation a été instantanée, aussi bien en Kabylie qu’au sein de la diaspora. En effet, des individus de la région se sont organisés pour faire accélérer les travaux de restauration du domicile familial. Une cagnotte a également été lancée par l’ONG Aza-Rouge sur Facebook. Celle-ci, toujours ouverte, a atteint 4566€ au moment où nous publions ces lignes.

Du haut de ses 60 ans et de ses 1m95, Mouloud Mebarki, ce géant de l’Est de la Kabylie, a eu un parcours dont peuvent se reconnaître beaucoup de Kabyles de sa génération. Sa particularité est celle d’avoir su faire évoluer ses analyses avec l’évolution de la donne, mais en gardant le même entrain et la même détermination, avec une foi infaillible en le Peuple Kabyle.

Mouloud Mebarki
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