Pourquoi nous n’avons, comme les banlieusards, que des chanteurs, des politiques et des sportifs connus ? Pas de médecins, pas d’architectes, pas d’ingénieurs, pas de grands juristes, pas d’investisseurs, pas de sociologues, pas de philosophes, pas de chercheurs, pas de dramaturges, pas de mécènes, pas d’historiens, pas de producteurs de spectacles, pas de réalisateurs de films, pas de peintres, pas de cuisiniers, pas d’artisans, pas d’éditeurs, pas d’agriculteurs, pas d’inventeurs, pas de créateurs de mode, pas de grands journalistes, pas de bons boulangers… notre statut de minorité nous condamne, comme les banlieusards, au foot, à la danse, à la boxe, à la chanson, aux marches, aux émeutes et à miss Kabylie.
Nous devons nous donner une autre forme d’organisation pour pouvoir developper tous les autres secteurs, en dehors de la chanson et du football, et laisser enfin les gens s’exprimer chacun dans son domaine. Il faut toutes ces compétences pour pouvoir mettre en route une économie, une culture et une vie à la fois kabyle et universel. A quoi sert aujourd’hui un architecte kabyle ? Même s’il veut rekabyliser et moderniser nos villes et nos villages, il ne peut pas. Il n’a pas personne derrière lui. Que des militants dévoués mais sans aucun moyen. Il n’a pas derrière lui, non plus, des structures étatiques politiques, juridiques et financière.
Et c’est valable pour tous les autres domaines. Beaucoup de compétences kabyles veulent rendre service à leur Kabylie et à leur culture, mais quoi ? C’est ce manque de cadre politique qui pousse des chercheurs universitaires et des imminents scientifiques à faire de mauvais poèmes (Ils sont tous devenus poètes).
En principe, c’est du devoir des élus locaux de créer toutes ces structures. Sinon à quoi bon les élire si c’est pour juste boucher les nids de poule. Je sais, je sais, les pauvres n’ont aucun pouvoir que celui de construire des mosquées et des monuments aux morts.
A ce rythme, la Kabylie cessera bientôt d’être cette belle campagne verte et paisible d’Algérie, mais sa banlieue déracinée tout le temps en ébullition.