« Tamazight » : une langue Kabyle qui écrase les autres langues berbères? (par Mohand Belkacem)

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Défendre l’idée d’une langue kabyle n’est pas un mépris envers les autres communautés linguistiques berbères. Cette idée émane d’une réalité socioculturelle, sociolinguistique et sociopolitique.

C’est une chance qu’on offre aux langues « filles » de la famille du berbère de se développer naturellement et sauvegarder leurs richesse phonétique, morphologique, lexicale, syntaxique, grammaticale et sémantique.

Cela ne passera pas évidemment par un standard pour tout le monde à l’image de l’arabe qui ne se parle d’ailleurs nulle part. Nous ne voulons pas réserver le même sort aussi pour nos langues d’Afrique du nord. Le Kabyle domine actuellement les autres langues berbères en Algérie par sa visibilité due à la production et surtout à la demande sociale. Comme résultat, la Kabylie s’est accaparé les institutions en charge de développer la langue « Tamazight » à l’image du HCA, CNEPLET, DLCAs (même le petit département de langue de Bouzareah), l’enseignement, les médias, Internet… d’où l’influence et la domination du kabyle.

Cette situation risque d’écraser les autres langues berbères au nom de « tamazight ». La dernière intervention de Hacène Hireche sur une TV Web (Taddart-nneɣ) sonne le glas et montre que la démarche de nos aînés est parfois possible d’être qualifiée de malintentionnée en matière de réflexion (du jacobinisme amazigh à forte dominante kabyle).

On est entrain d’usurper (représenter) le mot générique « Tamazight » pour placer du contenu kabyle, ce qui peut accélérer la disparition de la diversité linguistique (et même culturelle) de la famille des langues du berbère. Cette diversité qui a été maintenue jusqu’à présent et que même l’arabe et le français n’ont pas réussi à faire disparaître, alors que cette génération refuse cette démarche écrasante et adopte plutôt le principe de la diversité linguistique.

Réclamer les mêmes droits pour toutes ces communautés linguistiques peut laisser la chance aux autres langues berbères pour s’épanouir elles-même en choisissant des outils propres à elles (script, conventions de notations, emprunts…) et surtout ne pas gêner le Kabyle à prendre l’orientation voulue par ses propres locuteurs.

Traiter séparément les langues berbères, c’est leur donner la chance pour qu’elles vivent toutes dans leur environnement.

Mohand Belkacem – Ibetṛunen