Vous allez me taxer de régionaliste, de Kabyle trop fier et arrogant, mais je peux affirmer sans me tromper, que la tolérance s’arrête aux frontières de la Kabylie. Au-delà, c’est Kaboul. Des contrées ravagées par l’intégrisme et le dogme religieux. Pendant qu’en Kabylie les parents envoient leurs enfants à la crèche, c’est à la mosquée que les parents des autres régions envoient leurs progénitures. C’est devenu à la mode. C’est même une fierté pour ces musulmans trop croyants.
En Kabylie, que tu sois musulman pratiquant, musulman du mois de carême, chrétien, agnostique ou athée, tu es intégré dans la société de façon naturelle. Ce qui détermine la valeur d’un individu en Kabylie, ce n’est ni sa foi , ni sa richesse, ni son nom de famille, mais son comportement; sa capacité à apporter du bien à la communauté, sa contribution dans la gestion de la cité.
Chez nous, la foi relève de la liberté individuelle. Nos aïeux, pourtant analphabètes, avaient compris cela avant même que le dictionnaire intègre le mot tolérance. L’islam tel qu’il était pratiqué, n’était pas en déphasage avec les valeurs sociétales propre à la Kabylie. Nos aïeux ont su l’adapter à leur besoin spirituel, de telle sorte qu’il ne soit en contradiction avec l’organisation socioculturelle de nos villages.
En Kabylie, la religion fait partie du quotidien de nos paysans. Ailleurs, la religion occupe une place importante dans la vie du citoyen. C’est vers celle-ci qu’il se tourne au moindre questionnement, à la moindre crainte, au moindre événement, banal soit-il. La religion c’est la clé. C’est la solution à tous les soucis même lorsque celle-ci s’avère dépassée, comme lorsqu’il s’agit de guérir des maladies ou expliquer des phénomènes naturels étranges.
Entre la Kabylie et les autres régions, il n’y pas que la langue qui diffère, il y a plus profond que cela; l’aptitude à la civilisation. Pendant que la Kabylie avance et se met au diapason d’un monde qui évolue, les autres régions sombrent dans les fin fonds du fondamentalisme, prises au piège du passé d’un État islamique glorieux qui n’en est pas un.
La Kabylie et les autres régions ont emprunté deux chemins qui ne peuvent s’entrecroiser; ils sont diamétralement opposés. L’un mène vers le progrès, la civilisation et toutes les valeurs qu’elle entraîne, pendant que l’autre, c’est un sens interdit qui mène droit vers la collision. Sommes nous condamnés à les dissuader de rebrousser chemin pour nous accompagner, ou devrons nous faire notre chemin sans se retourner? C’est une question qui mérite d’être tranchée.
Salim Chait, journaliste et militant