Je me suis exprimé maintes fois à propos de Yennayer pour dire que je ne suis pas en 2970, que Yennayer n’a rien à voir avec Chachnaq. Mais à chaque Yennayer, on m’envoie en privé des articles et des vidéos qui disent le contraire. On a l’impression que les gens ne lisent pas et n’écoutent pas. Dès qu »ils voient ou entendent le mot Yennayer, ils te l’envoient sans tenir compte de ta position.
Ils n’arrivent pas à comprendre que Yennayer, en Afrique du Nord, est devenue une affaire politique. Tous les pro-pouvoirs sont d’accord pour lui ôter son caractère religieux, pour en faire une simple fête traditionnelle qui célèbre, chez certains, un fait historique dont on ignore tout. Chachnaq est un argument politique, on l’utilise pour ne pas contrarier la doctrine religieuse islamique officielle. Le pouvoir a hallalisé Yennayer en le reconnaissant : d’accord pour le jour de Yennayer chômé et payé, mais il faut lui trouver un sens historique ou traditionnel.
Yennayer est une fête païenne. Elle fête le retour de la lumière. C’est la nouvelle année qui marque le renouveau cyclique de la lumière et de la nature. Exactement comme le janvier latin. La seule différence, c’est que les Berbères le fêtent selon le calendrier agraire et les Romains selon le calendrier politique, et ce depuis Jules César. Avant ils le fêtaient selon le calendrier agraire. Yennayer était une fête mobile. Elle n’obéissait pas au temps historique.
Le cas de Chachnaq est lié à un fait historique. Il a peut-être pris le pouvoir en Égypte le jour de Yennayer mais il n’a pas inventé Yennayer. Mais cette version arrange beaucoup de monde : les islamistes qui le veulent comme tradition, les Berbéro-communistes qui le veulent historique, et le pouvoir qui le veut folklorique et comme faisant partie du patrimoine. Les trois tendances aiment Chachnaq à cause du sac de Jérusalem bien sûr. Le sauveur de la Palestine avant l’heure. Enfin, soyons sérieux, ce n’est pas sur les médias de service que nous risquons de voir un jour la bonne version de Yennayer.
Bientôt le pouvoir reconnaîtra Amagger n tefsut (l’accueil du printemps), le jour où Tariq Ben Ziyad a envahi l’Espagne. Ne laissons pas notre histoire entre les mains de nos ennemis et de leurs complices.