Le communiqué publié le 29 juin dernier par le parquet de Draâ El Mizan au sujet d’une affaire impliquant des activistes de mouvement Kabylistes qui sont le MAK, AKAL et le RPK a été largement repris par la presse algérienne. Ceci a suscité la confusion chez les citoyens, notamment après l’arrestation de cadre politiques kabyles, à l’instar de Bouaziz Ait Chebib, Hamou Boumedine ou encore Hocine Azem.
Nous avons donc cherché à en savoir plus sur cette affaire. Une personne directement concernée par le dossier mais qui a préféré garder l’anonymat a bien voulu nous apporter des éléments de réponse. Elle nous a alors confirmé que leur arrestation est bien en lien avec l’affaire du village Ait Abdelmoumène. Les éléments ci-dessous montrent que la justice est allée chercher loin, très loin, pour aboutir à l’arrestation de cadres politiques qui n’ont aucun lien avec l’affaire de ce village de la région d’Iwadhiyen.
Notre contact nous a expliqué qu’il existe, que depuis plusieurs années, un véritable conflit entre le village d’Ait Abdelmoumene et un groupuscule de citoyens du village manipulés par un imam salafiste, Ccix Farid en l’occurrence, qui, par ailleurs, était au centre de polémiques, à plusieurs reprises. Les pratiques de ce prêcheur d’islamisme ont suscité la colère des villageois ainsi que des citoyens établis à l’étranger. L’un de ces derniers, à priori vivant en France, a posté une vidéo sur les réseaux sociaux exprimant ses inquiétudes et appelant à mette fin aux activités de cet imam. Il aurait également usé de dépassements verbaux et de menaces, sous l’effet de la colère.
Le prêcheur, ainsi qu’un groupe de citoyens ont déposé plainte à l’égard de ce villageois dont le nom du compte Facebook est « Massinissa Ait Abdelmoumene ». A noter que que la direction des affaires religieuses s’est également constituée partie civile contre cet individu. Jusque-là rien de particulièrement étonnant. Un imam salafiste d’un village Kabyle subit des menaces et la justice algérienne se précipite pour le protéger.
Toutefois, cette affaire a pris des tournures ahurissantes. En effet, durant le mois de juin, Belaid Amar Khodja, ancien cadre du MAK et de l’URK, a été victime d’une agression et a décidé de porter plainte. Les gendarmes se présentent chez lui, opèrent une perquisition de son domicile, lui confisquent deux téléphones et une tablette et le mettent en état d’arrestation. Il s’est vu ainsi passer de victime à accusé. La raison ? Massinissa Ait Abdelmoumene et Belaid Amar Khodja sont « amis sur Facebook ». Cela a suffi, a assuré notre source, pour impliquer le militant dans cette affaire et d’en faire un complice. Pour remplir son dossier d’accusation, la gendarmerie a également décidé de le poursuivre, entre autres, pour « offense à l’islam » pour ses publications Facebook. Des posts à travers lesquels il a dénoncé le mariage des mineurs, l’islamisme ou encore l’arabisation sous prétexte que l’arabe serait la « langue du paradis ».
Après avoir arrêté Belaid Amar Khodja, les gendarmes algériens ont continué de dérouler le fil pour atteindre d’autres militants politiques. Ainsi, ils ont décidé de faire un lien avec Hamou Boumedine, porte-parole du RPK et avec Bouaziz Ait Chebib, Coordinateur de AKAL, et Hocine Azem, ex-cadre du MAK et de l’URK, pour la simple raison que Belaïd Amar Khodja a déjà communiqué avec ces cadres politiques sur Messenger. Quant à Boussad Becha, un autre cadre d’AKAL et ancien cadre du MAK, qui s’est présenté au groupement de la gendarmerie de Bouhinoun au lendemain de la réception de sa convocation, il a été poursuivi pour « tentative de fuite ». Un autre compagnon de Bouaziz Ait Chebib, Abdelkader Ould Abdesselam, a été convoqué mais ne s’est, quant à lui, pas encore présenté devant la gendarmerie.
Les activistes emprisonnés, issus de différents mouvements politiques kabylistes, avaient été tous convoqués par la gendarmerie du groupement de Bouhinoun entre le 19 et 27 juin. Ils ont tous été placés en garde à vue avant d’être présentés devant le procureur près du tribunal de Draa El Mizan qui a décidé de les mettre sous mandat de dépôt.
En résumé donc, partant d’une affaire d’un citoyen d’un village accusé de menacer l’imam, des cadres politiques ont été envoyés en prison car ils avaient déjà discuté sur Messenger avec un « ami Facebook commun » (Belaid Amar Khodja en l’occurrence) de la personne accusée.
Il est clair qu’il s’agit d’un dossier monté de toutes pièces à l’encontre de ces politiques. Il reste à comprendre à quoi riment cette arrestation simultanée de cadres autonomistes/souverainistes, pourtant connus pour leur discours conciliant et bien moins ferme que celui des indépendantistes du MAK.