Avons-nous oublié l’affaire du voleur d’Aqbou ? Affaire où, comme celle d’aujourd’hui, presque tous les Kabyles se sont sentis pareillement coupables et voulaient se montrer humains et justes en s’auto-condamnant alors violemment et toute la Kabylie avec. Rares ceux qui avaient relevé alors que la foule avait pendu le voleur par les pieds et non par le cou et que la police avait laissé faire. Il s’était avéré à la fin que le voleur faisait partie d’une bande de malfaiteurs qui avait attaqué un vieux paysan pour lui voler l’argent qu’il venait d’encaisser en vendant sa vache pour nourrir sa famille.
Encore une fois, nous y voila; nous ne retenons pas la leçon.
Les uns impulsifs et les autres nullement politisés, beaucoup de Kabyles ne prennent pas le temps de voir les choses, de les analyser. Nous réagissons au quart de tour.
Ainsi, nous nous laissons à chaque fois manipuler, oubliant que ce sont nous qui subissons l’agression.
De notre propre chef, nous nous faisons alors détourner de l’essentiel (qui nous concerne en premier) et allons vers le détail (qui ne nous concerne que peu, voire qui nous accuse).
Nous ne regardons alors pas ce qui se passe autour de nous, en face de nous; nous ne voyons que devant nos nez.
Notre premier principe qui nous anime est l’humanisme et non notre cause, ni notre propre existence. Nous sommes humanistes envers les autres; pire, nous le sommes envers nos ennemis mais pas envers nous-mêmes.
Et nous nous laissons aller à culpabiliser et à nous auto-flageller. Nous allons alors, naïvement, jusqu’à demander pardon à nos bourreaux, voire nos manipulateurs.
Dans nos petites têtes, nous passons de victimes à bourreaux; et pour des actes vils dont nous endossons alors volontiers la responsabilité alors que ce sont nous qui en sommes le sujet.
Nous nous sentons obligés de laver notre honneur au lieu de laver l’affront, obligés de nous montrer dignes, honnêtes, humains, justes et hauts. Nous nous oublions et oublions notre souffrance et notre martyre; nous différons notre intérêt, notre cause, notre lutte, notre combat. Alors nous nous prosternons devant nos ennemis, ceux qui nous ont soumis, manipulés.
Dans ces guet-apens, toujours crapuleux, que nous tendent nos ennemis, nous ne supportons pas l’insulte des autres mais au lieu d’y répondre logiquement et intelligemment en pensant d’abord à nous-mêmes, non, nous multiplions cette insulte, nous nous laissons convaincre que nous avons mal agi car nous nous sommes faits coupables.
Au lieu de chercher l’anguille sous roche, nous passons ainsi à nous justifier pour les ignominies que les autres nous font subir.
Et va les explications, les démonstrations, les supplications – l’éternelle auto-flagellation -.
Et nous convainquons ainsi nos enfants que nous sommes nuls.
Cette propension à toujours vouloir démontrer à qui veut entendre que nous ne sommes pas des sauvages ! Alors que c’est nous qui sommes sujets de la barbarie !
Cesserions-nous, un jour, d’être naïfs ?
Tarik Tinouche
13/08/2021